Ce projet, soutenu par les acteurs de la filière canard (dont la sélection génétique) s’inscrivait dans une démarche d’amélioration de certaines caractéristiques des canards issus de croisement interspécifique entre le canard de Barbarie et la canne Commune de race Pékin : le mulard. En travaillant sur le généotypage et la création d’une puce à ADN, les sélectionneurs français pourront rester compétitifs en améliorant leur sélection sur la qualité des produits et la santé des animaux. Rencontre avec Sophie Brard-Fudulea, Chef de Projets Génomique au SYSAAF (Syndicat des Sélectionneurs Avicoles et Aquacoles Français).
L’objectif du projet CanArray était le développement d’une puce à ADN pour le génotypage haute densité du canard Commun et du canard de Barbarie. Pour cela, il fallait d’abord finaliser l’assemblage du génome du canard de Barbarie et mettre à jour celui du canard Commun. Un tel outil de génotypage permet à terme d’envisager une amélioration de la sélection pour la qualité du foie gras et de la viande ou pour la résistance aux maladies, des caractères difficiles à améliorer dans des schémas de sélection classiques.
Le caractère innovant du projet réside dans le développement de la puce pour les deux espèces de canards. Aucun outil de génotypage n’était disponible pour ces deux espèces, il s’agit d’une première mondiale. La puce 600K SNP produite dans CanArray rend maintenant possible pour les sélectionneurs partenaires la mise en place de la sélection génomique. Pour les organismes de recherche, la puce pourra être utilisée pour étudier le déterminisme génétique de diverses fonctions physiologiques.
L’assemblage du génome du canard de Barbarie a été réalisé, et le séquençage de lignées commerciales et de races locales a permis l’identification de marqueurs SNP qui ont été montés sur la puce. Du génotypage a été réalisé afin de vérifier la qualité de la puce, montrant que pour chaque espèce plus de 85% des marqueurs sont de haute qualité. La puce est disponible depuis le mois de janvier 2020, et les partenaires industriels ont entamé des travaux complémentaires pour valoriser cet outil dans leurs schémas de sélection. La puce est aussi utilisée en ce moment pour développer un outil d’assignation de parenté qui permettra de finaliser un programme de recherche de l’INRAE, et qui a également vocation de gérer la biodiversité de races locales de canards.
Le développement d’une puce de génotypage haute densité telle que celle produite dans CanArray représente un investissement important, et nécessite de mobiliser dans le projet des scientifiques de haut niveau dans le domaine de la génomique. Le SYSAAF, porteur du projet, a souhaité faire collaborer les deux sélectionneurs français de palmipèdes afin de mutualiser les compétences et de produire un outil de génotypage robuste et directement utilisable pour les entreprises. En tant que syndicat professionnel, nous privilégions autant que possible les démarches collectives au service de nos adhérents avicoles, aquacoles ou entomocoles, et c’est ce qui a été réalisé dans CanArray. Aujourd’hui, les objectifs sont atteints, et les deux sélectionneurs bénéficient d’un outil performant et adaptable à leurs lignées.
Sophie Brard-Fudulea - SYSAAF
ingénieur en génétique - génomique quantitative