Ce projet d’innovation industriel précompétitif labellisé en 2013 visait à déterminer comment les peptides issus de l’hydrolyse des protéines du lait peuvent servir de levier afin d’avoir une conduite raisonnée de la fabrication de matrices riches en protéines. Un pool de peptides dont les caractéristiques en font de potentiel ingrédients fonctionnels alimentaires a notamment été développé, ainsi que différentes méthodes d’analyses statistiques de données d’identification et une approche multi-échelles sur des « systèmes laitiers concentrés » rarement étudiés jusqu’ici. Rencontre avec Valérie Gagnaire, Chargée de Recherche à l’UMR STLO (INRAE), coordinatrice du projet.
Les aliments sont, pour la plupart, des matrices complexes, concentrées et structurées. Pour en maîtriser l’élaboration et pour en améliorer la qualité, un des verrous actuels est de comprendre les propriétés d’assemblage des protéines et des peptides dans les milieux concentrés et de déterminer quels sont les leviers permettant de moduler ces assemblages. En effet, l’hydrolyse « contrôlée » des protéines peut favoriser ou limiter certaines propriétés fonctionnelles (émulsifiante, moussante, filante…) selon la nature des peptides (hydrolysats) produits. Ces peptides peuvent être produits soit « in situ » lors du processus de transformation et faire partie intégrante de l’aliment, soit être isolés et ajoutés lors de la fabrication sous forme d’ingrédients fonctionnels. L’objectif de ce projet est de déterminer comment les peptides issus de l’hydrolyse des protéines du lait peuvent servir de levier afin d’avoir une conduite raisonnée de la fabrication de matrices riches en protéines, par exemple les fromages dont les propriétés à chaud sont essentielles.
Les propriétés des peptides dérivés de certaines protéines comme la caséine beta ou la beta-lactoglobuline sont connues et ont été étudiées depuis longtemps. Cependant ces travaux antérieurs ont été réalisés dans des milieux dilués, qui sont éloignés des milieux concentrés en protéines que sont les aliments. Le projet PEPS ambitionnait de travailler sur des matrices concentrées et complexes, beaucoup plus proches de la réalité des aliments et de montrer le rôle fonctionnel des peptides dans ces matrices. Les principales retombées scientifiques et technologiques de ce projet intéressent la filière laitière, en effet au cours de PEPS nous avons pu développer :
La thèse menée pendant le projet a été un défi à plusieurs égards. Elle a fait appel à des approches multidisciplinaires et multi-échelles, du moléculaire au microscopique et au macroscopique. Le transfert de concepts de systèmes simples (milieux dilués) à des systèmes plus complexes (milieux fortement concentrés) était un vrai challenge ! Cette réussite à permis d’obtenir plusieurs articles dans des journaux scientifiques internationaux (à comité de lecture). De même plusieurs conférences et congrès internationaux (avec posters) ont été réalisés.
Les méthodologies développées dans le cadre de PEPS peuvent bien sûr être appliquées à d’autres types de protéines, à d’autres d’hydrolysats. Il est désormais possible, au travers des connaissances acquises durant le projet, de générer des ingrédients à base d’hydrolystats caséiniques dont les fonctionnalités sont modifiées en fonction des propriétés que l’on veut obtenir et de développer de nouvelles technologies de préparation de matrices laitières avec des propriétés techno-fonctionnelles spécifiques soit en adaptant les fabrications traditionnelles soit en créant de nouveaux produits. Nous n’en sommes plus à constater et étudier l’effet d’une enzyme sur un produit, mais à concevoir des enzymes dans le but d’obtenir le produit que l’on souhaite.
Ce bilan très positif a été rendu possible grâce à l’association des expertises de chaque partenaire. Le collectif réuni autour de Bba, à savoir l’UMR STLO, Actalia Produits Laitiers, les équipes d’Agrocampus Ouest et l’Université de Rennes 1, a permis de donner une ampleur au projet qui ont, in fine, amélioré son rayonnement international. La doctorante qui a réalisé l’essentiel de ces travaux a d’ailleurs trouvé un poste au sein de l’équipe Recherche et Innovation d’un des plus grands groupes laitiers français (un des adhérents du consortium Bba).
Valérie Gagnaire - INRAE - CENTRE RENNES
Chargée de Recherche STLO